Être utile – trouver du sens au travail

Le terme anglais « purpose » est sans aucun doute un terme à la mode. En particulier parce qu’il est communément admis que les jeunes générations (y, en particulier) sont en quête d’une motivation au travail plus importante que les baby-boomers qui se satisfaisaient de gagner leur vie (affirmation que l’on peut remettre en cause…) Comment trouver l’activité qui donne du sens à sa vie ? Qui a du sens pour soi ?

Qu’est-ce donc que cette motivation, ce sens d’un dessein voire d’un destin que certains expriment ?

Les personnes ayant une vocation ont certainement ce sentiment que quelque chose qui n’est pas du domaine de la raison les conduit à faire ce qu’elles font. Un artiste a une vocation, sans doute, un médecin aussi… Ces métiers font souvent rêver parce qu’ils semblent appartenir à un ordre supérieur du labeur humain : ils relèvent d’un appel plus que d’une décision de s’investir dans une carrière (on pourra sans doute m’opposer que certains médecins…).

Je voudrais trouver un travail qui ait du sens…

La question est finalement celle du sens du travail, de notre travail : « je voudrais trouver un travail qui ait du sens ». Du point de vue de la sociologie, le travail de chacun fait sens pour la société : « ce que chacun fait au travail touche à la finalité de tout travail, c’est-à-dire : être de la société, en faire partie et la faire exister […] » (Danièle Linhart, Pourquoi travaillons-nous ?). Travailler, c’est ainsi être engagé dans une activité pour autrui, la société.

Travailler, c’est avant tout participer à la vie de la société

C’est aussi cette conception qui est au cœur des débats sur le revenu universel : la société peut-elle, doit-elle verser le moyen de leur subsistance à des personnes qui ne travaillent pas ? Mais si la mesure du travail se fait à l’aune de la participation à la société, alors des activités bénévoles peuvent tout aussi bien jouer ce rôle.

Sens du travail - stickers

De quel sens parle-t-on quand on dit vouloir trouver du sens à son activité ? La notion d’aide revient souvent, de soin, d’accompagnement, mais pas seulement. L’écologie, le développement du

rable sont aussi des thèmes abordés. La création de sens se fait ainsi  soit au niveau individuel dans une relation personnelle avec la personne « aidée » soit au niveau collectif avec un enjeu sociétal.

“J’appelle travail l’activité de l’être humain qui, confronté à des contraintes produit selon un projet déterminé, quelque chose pouvant servir à d’autres”*

Le sens que nous donnons à notre travail est aussi en grande partie un héritage : celui de notre famille, de notre groupe social – que ce soit pour se conformer à une tradition ou au contraire s’y opposer. La façon que nous avons d’appréhender notre travail dépend ainsi de notre histoire personnelle : la première reconnaissance que nous recherchons étant celle de ceux qui nous sont chers, de ceux dont l’opinion a de l’importance (parents, conjoint, fratrie, amis…). Certains seront dans une relation compulsive avec le travail parce que traditionnellement, autour d’eux, il convient d’être super occupé – voire même de s’oublier dans le travail – que travailler moins est perçu comme de l’oisiveté. Qu’il est nécessaire de montrer que l’on travaille dur, que l’on mérite l’estime de tous.

Le sens que nous trouvons dans notre travail est donc une construction complexe qui allie reconnaissance externe – de nos proches, de l’entreprise, de la société – et satisfaction personnelle d’accomplir une tâche qui a du sens pour nous.

Aider les gens, soulager la douleur sont de puissants desseins qui reviennent souvent dans l’expression du souhait de changer de carrière. Mais comme il n’est pas possible de  construire un plan d’actions sur une idée aussi vague, le vrai travail commence quand on se demande comment mettre en œuvre ce dessein, cette motivation.

Comment trouver ce sens de l’engagement, le sens de son activité ?

Dans chaque accompagnement d’une reconversion professionnelle, le problème est posé par la personne en demande : « je voudrais trouver un métier qui ait du sens ». Sans que l’on en sache plus sur ce sens au début du travail d’accompagnement.

Sens du travail - stickers (1)

Sans surprise, trouver ce qui fait sens pour nous dans le travail passe par un retour sur l’ensemble de nos activités – professionnelles et bénévoles :

  • Qu’avons-nous apprécié et pourquoi ?
  • Qu’avons-nous détesté et pourquoi ?
  • Qu’avons-nous appris ?

Quels sont nos intérêts ?

A-t-on tendance à se retrouver toujours dans le même type d’activités : organisation, création, écriture ou dans le même type de secteurs : scientifique, ingénierie, activités de service… que ce soit pour faire les activités ou les organiser.

Au-delà, sommes-nous au clair avec notre rapport au travail ? Quelles sont nos valeurs ?

Est-ce que le regard des autres, de la famille est important ? A-t-on besoin de notoriété ou de pouvoir ? Est-il important de gagner plus d’argent ? De manager ? De travailler pour une entreprise reconnue ? Une entreprise qui a une mission à laquelle on peut s’identifier ?

Peut-on par exemple trouver du sens à son activité lorsque l’on fait un métier dévalorisé ? La réponse est oui, si l’on prend le temps d’écouter les travailleurs de la propreté urbaine.

Peut-on trouver du sens à son travail lorsque sa finalité est uniquement celle de faire vivre sa famille ? La réponse est oui, là encore si l’on écoute les travailleurs – spécifiquement immigrés – de la propreté urbaine.

Peut-on trouver du sens à son activité dans une entreprise décriée si l’on travaille au bien-être de ses collaborateurs ?

Autrement dit, le sens du travail vient-il de l’organisation ou de la personne qui travaille, ou des deux ?

Ce qui donne sens au travail, c’est le sentiment d’être utile

Il est clair que les conflits de valeurs vident le travail de tout son sens : l’exemple le plus parlant étant celui des infirmières dans les hôpitaux qui doivent enchaîner les soins (techniques) sans avoir le temps du soin (écoute du patient).

Les conflits de valeur vident le travail de tout son sens

Mais il s’agit dans ce cas des circonstances du travail – un changement d’entreprise suffit parfois à résoudre le problème.

Sens du travail - stickers (2)

Certains trouveront du sens dans une activité annexe qui leur permettra de s’investir pleinement : http://bit.ly/2CS8plx 

Pour d’autres, la quasi-injonction qui est faite de trouver le sens de son activité, de son travail est surtout pénible, comme en témoigne cet article justement destiné au Millenials http://bit.ly/2zRnaCa

Trouver ce qui fait sens pour nous est un travail de longue haleine qui demande de reprendre l’ensemble de son parcours professionnel mais aussi de savoir analyser ce que l’on apprend sur soi-même. C’est une partie importante de toute démarche de reconversion professionnelle – bien plus importante que la liste de ses compétences.


*Pierre-Yves Gomez, Intelligence du travail.

 

 

 

Sarah Haïlé-Fida

Conseil en analyse des risques psycho-sociaux, gestion des âges et formation.
  1. […] multitude d’idées, d’envies différentes avec l’expression de la recherche de sens (mon article sur la recherche de sens), du besoin de créativité, de peur de l’ennui. Cela veut-il dire que la […]

  2. […] changement plus ancien, la grande majorité des demandes de reconversion expriment une demande de plus de sens, d’un sentiment accru […]

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