Travail et identité : que représente le travail dans notre construction identitaire ?

La rareté du travail pour cause de chômage grandissant semble donner au travail une place croissante dans l’idée que l’on se fait de notre identité, individuelle ou collective.

Qui n’a pas fait l’expérience lors de rencontres de cette première question : “Et toi, tu travailles dans quoi ?” Comme si la réponse à cette question suffisait à nous définir, à nous positionner les uns par rapport aux autres.

Et de fait, de quoi parle-t-on ? De boulot, de missions, sur le ton de l’accomplissement, de la valeur de ce que l’on fait.

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Les personnes sans emploi – femmes au foyer, personnes au chômage –  se sentent-elles exclues de ces échanges ? Sans doute. Il est toujours difficile de dire que l’on de travaille pas, par choix ou par contrainte… Le regard des autres est souvent (toujours ?) celui de l’incompréhension voire du mépris (même si ce mot peut paraître trop fort, trop connoté).

Et pourtant, le travail, notre travail est-il ce à quoi se résume ce que nous sommes ?

L’enquête “Histoires de vie – Construction des identités” menée par l’Insee en 2003 tend à démontrer le contraire.

Dans cette enquête, les grands domaines de la vie ont été abordés:

  • situation familiale
  • nationalité
  • généalogie
  • parents
  • lieux
  • politique
  • religion
  • emploi
  • loisirs
  • santé
  • relations avec les autres

Puis il était demandé à chaque répondant de préciser trois thèmes – parmi ceux abordés – qui permettent de dire qui il est (on tenait compte de l’ordre des réponses).

Près de 60% des personnes interrogées ne font pas figurer les travail dans les 3 thèmes qu’elles considèrent comme pouvant les définir. 76% des personnes choisissent la famille comme 1er choix.

Mon expérience d’entretiens montre qu’en effet, y compris lorsqu’ils sont interrogés sur leur lieu de travail, au sujet de leur travail, les salariés parlent de leur famille, en particulier de la conciliation plus ou moins facile entre vie professionnelle et vie personnelle.

Pour autant, difficile de nier que le travail nous définit aux yeux des autres… Il nous classe dans une hiérarchie de revenus, de catégories sociales, de responsabilités, etc. À nos propres yeux, maintenant, le travail apparaît comme un marqueur identitaire fort d’autant plus que l’on appartient à une catégorie socio-professionnelle élevée et que l’on est sans charge de famille.

Symétriquement, le travail est considéré comme la chose la plus importante dans le vie pour les personnes sans emploi ou avec un emploi précaire (temps partiel contraint, CDD…).

Et enfin, les femmes ont globalement moins tendance à se définir par leur activité professionnelle que les hommes, en particulier lorsqu’elles ont des enfants.

Autrement dit, l’enquête de l’Insee met en lumière 3 tendances de notre rapport au travail:

  1. Plus le travail manque, plus l’emploi est précaire et plus on lui donne de l’importance
  2. Le travail est un fort marqueur identitaire en l’absence de famille
  3. Les femmes subissent plus que les hommes le télescopage des différents temps (professionnels, familiaux, etc.) ce qui a un impact sur leur rapport au travail.
Image courtesy of jscreationzs/ FreeDigitalPhotos.net

Sarah Haïlé-Fida

Conseil en analyse des risques psycho-sociaux, gestion des âges et formation.

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